Une langue maternelle signifie littéralement « langue transmise par la mère ». La mère est la première personne qui interagit avec l’enfant et sa voix est aussi celle que le fœtus entend en premier et le plus souvent. Est-il possible d’oublier sa langue maternelle ?
Un apprentissage facile
Apprendre à parler est inné chez l’enfant. Il va tenter de mimer son entourage et particulièrement ses parents. Il commencera par prononcer quelques sons, puis des mots, et enfin des phrases. Au fil du temps, son vocabulaire va s’étoffer. Un enfant a la capacité d’apprendre rapidement et facilement toutes les langues qu’il entend durant sa petite enfance. Ainsi, lorsque les parents sont bilingues, l’enfant pourra facilement comprendre et parler et les deux langues. Un enfant qui entend parler régulièrement plusieurs langues étant petit, aura plus de facilités à apprendre et comprendre d’autres idiomes plus tard.
Un oubli difficile
Si l’apprentissage d’une langue chez un enfant se fait rapidement, il est tout aussi possible de l’oublier en absence de pratique. L’oubli n’est toutefois pas permanent. C’est-à-dire que, « remis dans le bain », les sujets retrouvent rapidement le vocabulaire, les tournures de phrases etc.. Bien sûr, cela n’est valable que pour une langue apprise et maîtrisée. Si, en revanche, il existe une réelle fracture entre la langue maternelle et la langue parlée (par exemple dans le cas d’une adoption), la langue maternelle peut être totalement oubliée. Il en va de même pour les langues parlées entre les parents mais pas de façon triangulaire avec les enfants. Par exemple, pour une « meilleure intégration », certains parents décident de ne pas enseigner leur langue maternelle à leurs enfants. Ces derniers peuvent maîtriser les basiques mais ne seront pas bilingues pour autant. Ils auront plus de facilités à oublier cette langue.
Comment cela est possible ?
La langue maternelle est inscrite dans le noyau cérébral, tandis que la langue étrangère est concentrée dans sa périphérie. Ainsi, l’organisme humain est fait de telle sorte qu’une langue maternelle apprise, comprise et maîtrisée parfaitement, ne puisse s’oublier. En revanche, une langue étrangère, même si elle a été pratiquée plus longtemps, peut s’oublier totalement. Certaines pathologies peuvent engendrer ce phénomène. Par exemple, la maladie d’Alzheimer est connue pour effacer les souvenirs récents. Ainsi, il peut arriver que des personnes expatriées souffrant de cette maladie oublient la langue du pays dans lequel ils ont immigré (même s’ils l’ont parlée pendant des années). En revanche, ils continuent à maîtriser leur langue maternelle.
D’après les propos recueillis par Brigitte A. Eisenkolb, docteur en linguistique et psychologie, auteure de « L’Equilibre du lexique mental en cas de bilinguisme franco-allemand et franco-italien. Le transfert revisité dans l’étude de l’attrition de la L1 » (Editions Tectum Verlag 2014).